Villégiature : à la découverte des crocodiles sacrés de Sabou au Burkina Faso

Ville aux multiples sites touristiques, Sabou est située à environ 80 km de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. Parmi ces sites, il y a la mare aux crocodiles sacrés. Un espace de détente et de découverte qui accueille des visiteurs des quatre coins du pays mais aussi de pays africains et même d’autres continents. Ces crocodiles qui trainent derrière eux toute une histoire, sont, selon le guide, inoffensifs et cohabitent en harmonie avec la population. A la découverte de ces animaux qui peuvent vivre plus de 140 ans.

La visite guidée a commencé dans un espace clôturé où sont exposées plusieurs statues qui résument l’histoire des crocodiles sacrés de Sabou, dans la province du Boulkiendé, région du Centre-Ouest. Cette histoire remonte à une époque très lointaine que le guide Joel Lamoussa Kaboré dit ne pas être à mesure de situer dans le temps. Toutefois, il connait bien de choses de cette histoire.

Un chef de terre du nom de Tampouré qui était allé à la chasse, fut tenaillé par la soif au point de tomber dans les broussailles, raconte Lamoussa Joel Kaboré. Et un crocodile, à la recherche de sa pitance, le trouva presque mourant. Il alla tremper sa queue dans de l’eau située à quelques jets de pierre de là, pour venir au secours du chasseur. Ce dernier qui a retrouvé la force grâce à cette bienveillance de l’animal le suivi jusqu’au cours d’eau où il se désaltéra à volonté.

Selon le guide, une fois retourné au village, le chasseur a réuni les vieux pour leur faire part de ce qu’il a vécu. A l’issue de cette rencontre, la décision a été prise d’informer le roi Naaba Gnemdé (NDLR : Gnemdé en langue mooré signifie rhinocéros), qui se rendit sur les lieux pour constater les choses de visu. A son retour au village il a convoqué la population de Sabou, explique le guide, afin de creuser une mare pour accueillir les crocodiles. Ils ont par la suite fait des sacrifices et ont demandé qu’à la première pluie il y ait assez d’eau afin d’accueillir les crocodiles. La demande a été exaucée, puis un matin, le chef a constaté effectivement la présence des crocodiles dans la mare.

Ayant sauvé un des leurs, il a été formellement interdit de consommer les crocodiles de cette mare. Et lorsqu’ils meurent, ils sont enterrés comme des êtres humains avec des funérailles. Le guide explique qu’ils ont leur cimetière, sous un baobab, de l’autre côté de la mare non sans ajouter qu’ils meurent très rarement. Il dira que le plus vieux est mort à l’âge de 141 ans en 2001. Ce sont des animaux qui ont une longue espérance de vie, a fait savoir Lamoussa Joel Kaboré qui précise que le ‘’doyen’’ qui vit toujours a 90 ans. Les visiteurs prennent du plaisir à monter sur son dos pour des séances de photos.  

Au bord de la mare

Après l’espace clôturé, la visite se poursuit aux abords de la mare. Nous suivons notre guide, muni d’un poulet. Les crocodiles se dirigèrent vers les abords de la mare jusqu’à la terre ferme dès qu’ils entendirent les cris du poulet. Un premier, puis un deuxième et un troisième suivi d’un quatrième. Le troisième à sortir de l’eau, précise le guide, est le plus âgé de la mare, le ‘’doyen’’ de 90 ans. Parmi eux un jeune crocodile, jaunâtre, âgé de 35 ans, mais vu d’œil, on lui donnerait moins de 10 ans. Ils se disputent le poulet que leur a apporté le guide Kaboré. Une bagarre éclata donnant lieu à une débandade des visiteurs. C’est le sauve qui peut.  

Notre guide explique qu’après la mort du ‘’patriarche’’ en 2001, environ six autres sont morts des suites de bagarre. Lamoussa Joel Kaboré raconte que leur bagarre peut s’étaler sur trois jours et seuls les plus forts peuvent survivre. La raison de ces embrouilles est généralement liée à la conquête des femelles. « Ils se battent à cause des femelles. Mais rarement à cause de la nourriture », expliquent le guide Kaboré qui ajoute qu’ils se comportent souvent comme des humains.

La mare, magnifique cadre, couvre un périmètre 10 km, selon les explications de notre guide du jour qui indique qu’elle renferme une centaine de crocodiles avec une dominance des femelles. Difficile de connaitre leur nombre exact, avoue Kaboré, qui totalise 35 ans dans son métier de guide. Selon notre guide du jour, il est difficile de voir les œufs d’un crocodile. Une femelle peut pondre jusqu’à 35 œufs.

Entre la nature verdoyante et le chant des oiseaux qui volent à basse altitude, les visiteurs sont émerveillés. Le cadre est enchanteur et charmant pour une visite de découverte. En cette saison pluvieuse l’air est frais avec un léger vent qui fait bouger les feuillages. Des passants qui vous adressent de chaleureuses salutations le tout couronné par un bon accueil qui donne envie d’y retourner à chaque occasion.

Pour éviter que les crocodiles s’attaquent aux visiteurs, chaque samedi les sacrifices sont faits par des vieux qui ont ce pouvoir, révèle Kaboré le guide qui parle aux oreilles de ces crocodiles, qui se nourrissent de poulets et de poissons. Les animaux qui s’approchent trop près d’eux peuvent également devenir des proies.

La mare aux crocodiles sacrés de Sabou, riche en histoire est un bel endroit de détente. Aujourd’hui les activités sont au ralenti, regrette Kaboré qui impute la raison à la situation sécuritaire. Il garde espoir que bientôt ce serait la fin du calvaire.

Masbé NDENGAR de Bodo