Le cancer du col de l’utérus : un grand mal silencieux !

9 أكتوبر 2023

Le cancer du col de l’utérus peut évoluer dans un silence total et sans aucun symptôme durant plusieurs années. Au Mali, la prévalence de la maladie est estimée à environ 2000 cas par an et plus de 70% de décès par an. Dr Sidibé Fatoumata, oncologue médicale au service d’hématologie et d’oncologie médicale au CHU de Pont G de Bamako, veille au traitement des femmes malades du cancer du col de l’utérus et d’autres types de cancers. La rédaction de Radio Jeunesse Sahel (RJS) est allée à sa rencontre.

Le cancer du col de l’utérus est une multiplication anarchique de cellules au niveau du col de l’utérus. Dans plus de 90% de cas, cette multiplication liée à un virus appelé HPV (Human papillomavirus), en français le virus du papillome humain. Ce virus est transmis par le contact sexuel ou rapport sexuel.
Dr Fatoumata Sidibé, oncologue médicale au service d’hématologie et d’oncologie médicale au CHU de Pont G de Bamako

Radio Jeunesse Sahel (RJS) : Quand on parle de cancer, de quoi s’agit-il ?

Dr Sidibé : Un cancer se définit comme la multiplication anarchique des cellules de l'organisme. C’est la localisation de ce cancer qui nous amène à parler de cancer de sein, du col de l’utérus entre autres. Tous les organes du corps peuvent être le siège d’un cancer.

RJS : Qu’est-ce que le cancer du col de l’utérus ?

Dr Sidibé : Le cancer du col de l’utérus est une multiplication anarchique de cellules au niveau du col de l’utérus. Dans plus de 90% de cas, cette multiplication liée à un virus appelé HPV (Human papillomavirus), en français le virus du papillome humain. Ce virus est transmis par le contact sexuel ou rapport sexuel.

RJS : Est-ce qu’être porteur du virus HPV est forcément synonyme d’avoir le cancer du col de l’utérus ?

Dr Sidibé : Être porteur du virus ne veut pas forcément dire qu’on va faire le cancer à 100%. Lorsqu’on est porteur de ce virus, on peut faire 10 à 15 ans avant que le cancer n’apparaisse. Il y a différents cas de figure, quand on contracte le virus HPV c’est asymptomatique, on ne s’en rend pas compte, il n'y a pas forcément d’infections non plus. Il y a des gens qui ont une bonne immunité qui vont éliminer totalement le virus. Certaines personnes vont neutraliser le virus, mais il va rester en attente dans le corps. Et dans d’autres cas, ce virus va entrainer des anomalies au niveau des cellules du col, ce qui va donner lieu à des lésions pré-cancéreuses. Quand elles ne sont pas traitées, ces lésions peuvent aboutir au cancer.

Le cancer du col de l’utérus est une multiplication anarchique de cellules au niveau du col de l’utérus. Dans plus de 90% de cas, cette multiplication liée à un virus appelé HPV (Human papillomavirus), en français le virus du papillome humain. Ce virus est transmis par le contact sexuel ou rapport sexuel.

RJS : Quels peuvent donc être les signes avant-coureurs du cancer du col de l’utérus ?

Dr Sidibé : C’est justement cela qui est assez difficile, il n’y a quasiment pas de signes avant de faire le cancer. Ces lésions ne font pas mal, elles ne font pas saigner le plus souvent et ne donnent pas non plus les pertes blanches ou autres signes pouvant mettre la puce à l’oreille. Le plus souvent, une fois que ces signes apparaissent, cela veut dire que le cancer est déjà là. C’est pourquoi il est très important de faire le dépistage du cancer du col de l’utérus. Le dépistage permet ainsi d’aller chercher ces lésions avant que le cancer n’apparaisse. Toute femme saine, qui a déjà eu ne serait-ce qu’une seule fois dans sa vie un rapport sexuel, doit se soumettre au dépistage de façon régulière, même après la ménopause. Souvent, les gens font l’erreur de penser que quand on est inactif sexuellement, on n’a pas besoin de dépistage, ce qui est faux. Le fait d’avoir eu un rapport sexuel même une fois expose au virus PHV qui va rester en attentes et provoquer des anomalies. Si ce n’est pas traiter, elles peuvent conduire au cancer du col de l’utérus.

RJS : Quels sont les facteurs favorisant le cancer du col de l’utérus ? 

Dr Sidibé : En plus du virus, ce qui favorise le cancer du col de l’utérus, c’est l’association avec d’autres infections. Malheureusement, dans notre contexte, les femmes vont mettre beaucoup de choses au niveau vaginal. Ces choses ne vont pas directement donner le cancer, mais le fait qu’eux aussi vont donner des infections, et leur association au virus PHV fragilise le corps et favorise l’apparition du cancer. Il s’agit notamment de la multiplicité de partenaires sexuels sans protection, la précocité des premières relations sexuelles. Plus on associe les facteurs, plus on augmente les risques.

Le cancer du col de l’utérus est malheureusement le plus fréquent chez la femme Il vient en première position avant le cancer du sein ou en deuxième position. Avant 2016-2018, le cancer du col de l’utérus était le cancer le plus fréquent au Mali. Grâce au programme de dépistage soutenu par certains opérateurs économiques du pays, il est venu à la seconde place et le cancer du sein est devenu le premier cancer le plus fréquent.

Le cancer du col de l’utérus est une multiplication anarchique de cellules au niveau du col de l’utérus. Dans plus de 90% de cas, cette multiplication liée à un virus appelé HPV (Human papillomavirus), en français le virus du papillome humain. Ce virus est transmis par le contact sexuel ou rapport sexuel.

RJS : Quelles sont les recommandations en termes de fréquence de visite pour le dépistage du cancer du col de l’utérus ?

Dr Sidibé : Une fois mature, il est recommandé pour la femme d’avoir au moins une fois par an une visite chez un gynéco, qui va pouvoir lui donner des conseils sur l’hygiène de vie, le régime alimentaire ou même lui apprendre à faire l’autopalpation des seins. Une fois que cette femme a eu des rapports sexuels, il lui est conseillé au moins 2 à 5 ans après de commencer à faire le dépistage du cancer du col de l’utérus. Au Mali le test que l’on fait est appelé IVA ou IVl (inspection visuelle à l’acide acétique, inspection visuelle au Lugol). Le dépistage doit être régulier, si au bout de 2 à 3 ans tout va bien, on peut même aller jusqu’à cinq ans d’intervalle. Le frottis cervico vaginal est également un moyen de dépistage du cancer du col de l’utérus, mais il est cependant plus coûteux. Le dépistage est une prévention secondaire, la prévention primaire est la vaccination. Cela permet d’éviter de rentrer en contact avec le virus HPV. Cependant, dans quasiment tous nos pays, ce vaccin n’a pas été intégré dans le calendrier vaccinal des enfants et adolescents. Il est donc en vente à la pharmacie, mais coûte cher pour la bourse de la majorité de la population.

RJS : Y a-t-il un âge où on est plus susceptible de développer le cancer du col de l’utérus ?

Dr Sidibé : Dans toutes les maladies, on va avoir un pic de fréquence. En Europe, c'est à partir de 40 ans. Mais chez nous en Afrique, compte tenu de certains contextes culturels, on a des cas depuis la vingtaine. Donc notre âge moyen se situe en deçà de la trentaine. Ce qu’il faut retenir c’est qu'à tout âge ça peut apparaître et surtout en rapport avec la précocité de l’activité sexuelle. 

RJS : Quel est le traitement en cas de cancer du col de l’utérus ?

Dr Sidibé : En termes de traitement, quand le diagnostic a été fait très tôt et le cancer se limite au col seul, on peut proposer la chirurgie. Au Mali, le plus souvent les patients nous arrivent à des stades auxquels on a dépassé le stade de chirurgie. Le cancer a déjà atteint d’autres organes autour comme la vessie, le rectum. Le cancer, une fois qu’il se développe et se propage, va trouer la vessie, ce qui va provoquer de l'incontinence urinaire. Quand c’est au niveau du rectum, il peut faire des trous, ce qui va permettre à la selle de passer par le vagin. À ceux-ci, on peut ajouter des saignements, des douleurs et d’autres pertes de liquides. Le cancer du col de l’utérus est très agressif, il circule dans le sang pour aller se loger dans d’autres organes du corps.

Une fois que le cancer est localisé au col de l’utérus, la vessie et le rectum, le traitement, c'est la radiothérapie plus la chimiothérapie. La radiothérapie devient indispensable une fois qu’on ne peut pas opérer.

Le cancer du col de l’utérus est une multiplication anarchique de cellules au niveau du col de l’utérus. Dans plus de 90% de cas, cette multiplication liée à un virus appelé HPV (Human papillomavirus), en français le virus du papillome humain. Ce virus est transmis par le contact sexuel ou rapport sexuel.
Dr Fatoumata Sidibé, oncologue médicale au service d’hématologie et d’oncologie médicale au CHU de Pont G de Bamako

Il y a trois grands volets en termes de traitement du cancer : il y a les oncologues médicaux pour un traitement médicamenteux chimiothérapie, il y a les chirurgiens qui vont opérer lorsque c’est ciblé, les radiothérapeutes. Le recours à la chirurgie ou à la radiothérapie, c'est vraiment quand le cancer est ciblé. Le cancer du col de l’utérus est tellement agressif que la chimiothérapie seule ne suffit pas. Malheureusement, depuis deux ans, il n’est pas possible de faire de la radiotéléphonie au Mali faute de machine, la seule du pays étant en panne. Ce qui fait que nos patients sont seulement sous chimiothérapie, nous ne pouvons malheureusement pas les guérir, nous stoppons uniquement l’évolution de la maladie. Nous n’avons pas l'arsenal thérapeutique complet qu’il faut pour faire face aujourd’hui, ni à la prévention primaire, ni pour le traitement. Tout ce que nous pouvons faire, c’est le dépistage ou encore la prévention secondaire du cancer du col de l’utérus chez toutes les jeunes femmes ayant déjà eu un rapport sexuel.

RJS : Dr, puisque le PHV est un virus sexuellement transmissible, les femmes ne sont donc pas les seules à être concernées ?

Dr Sidibé : C’est justement pour cela que pour la prévention primaire, la vaccination doit concerner autant les jeunes filles et les jeunes garçons. Le virus PHV étant sexuellement transmissible, il peut donc être à l’origine d’autres cas de cancer comme le cancer de la gorge, de l’anus et le cancer du pénis. Ces différents cas sont liés à la cartographie sexuelle de nos jours. Les hommes sont donc tout aussi concernés même si c’est moins fréquent que le cancer du col de l’utérus. Nous pouvons tous être porteurs du virus HPV et le transmettre à notre partenaire.

Bintou DIABATÉ