Influence des réseaux sociaux sur l'éducation sexuelle des jeunes
Les réseaux sociaux font partie du quotidien des populations. Pour acheter des produits, on fait recours à Internet. Pour commander un repas, il faut cliquer. Pour se déplacer, il faut encore cliquer. Ces outils qui semblent faciliter, sinon simplifier la vie pour beaucoup d’utilisateurs, modifieraient, d’une manière ou d’une autre leur mode vie. Tout, sinon presque tout se passe via Internet y compris l’éducation des adolescents et des jeunes. Pour certains, les parents ont démissionné de leur rôle d’éducateurs, laissant place aux médias dont les réseaux sociaux. Du 13 au 14 juillet 2023, dans le cadre du Projet Stream 2, l’Association Burkinabè pour le Bien-Être Familial (ABBEF) a organisé une formation au profit de 15 journalistes avec pour objectif de les outiller sur le contenu de l’Education à la vie familiale (EVF). A l’issue de ladite formation, le thème qui fait l’objet de cet article a intéressé notre rédaction.
Difficile de contrôler ces outils ainsi que leurs offres ; par conséquent, les jeunes sont exposés à des contenus qui sont souvent très peu recommandables : sextapes, films pornographiques, images obscènes…
Il se pose alors le problème de l’éducation sexuelle des jeunes. Autrement dit, quelle est l’influence des réseaux sociaux sur l'éducation sexuelle des jeunes ?
Les réseaux sociaux sont un outil accessible à tous : adultes, jeunes et adolescents. Et comme tout outil, tout dépend de son utilisation. Il peut être utilisé à des fins bénéfiques mais aussi de la mauvaise manière. Sur le sujet relatif à l’éducation sexuelle des jeunes, Romuald Kaboré, Psychologue et coach, fait savoir que les réseaux sociaux ne sont pas neutres. « Le jeune est au contact des images qu'il pense parfois être la réalité et psychologiquement, l'individu a tendance à imiter et à reproduire ce qu'il voit », explique-t-il. Priscille Bansé, écrivaine, renchéri que les jeunes regardent les films pornographiques où les acteurs ne sont pas protégés et ils vont reproduire cela avec le lot des maladies et les grossesses en milieu scolaire.
Fatmata Bancé, mère, d’ajouter que l’influence des réseaux sociaux sur l’éducation sexuelle des jeunes est indéniable. « Il n’y a pas longtemps les parents surveillaient ce que les enfants regardaient à la télévision mais aujourd’hui ce qui se passe sur les réseaux sociaux est plus grave », relate-t-elle.
Le psychologue Romuald Kaboré fait savoir que cette situation est liée au tabou sur la sexualité. Pour lui, nombreux sont des parents qui n'ont pas été éduqués pour parler librement de la sexualité avec les enfants alors que, poursuit-il, les jeunes ont besoin d’informations que les parents n’arrivent pas à leur donner. Et c’est pour cela que les « réseaux sociaux ont pu happer et remplacer rapidement ce qui devrait être fait par les parents ».
Selon Basseratou Kindo, journaliste et promotrice du média en ligne Mousso News il est clair que « les réseaux sociaux ont une répercussion négative sur la sexualité des jeunes » dans la mesure où, dénonce-t-elle, des enfants de dix à douze ans ont des smartphones, et ont accès aux réseaux sociaux notamment Facebook où ils consomment des contenus en lien avec la sexualité.
Si Fatmata Bancé, mère, relativise le rôle de certains parents dans l’éducation sexuelle des enfants, Basseratou Kindo n’est pas allée du dos de la cuillère : « Il faut le dire, c'est malheureux, des parents ont démissionné dans l'éducation sexuelle des enfants ». Pour elle, quand on est parent, il faut avoir du temps pour les enfants.
Wamboè Bako est un jeune promoteur culturel. Il estime que les réseaux sociaux sont semblables à un espace de non droit et non règlementé ni sous aucun contrôle où des enfants sont exposés aux images pornographiques. Il va de soi, toujours selon Wamboè Bako, qu’ils aient une influence sur les jeunes en matière de santé sexuelle et reproductive.
Abbé Justin Zangré, auteur de l’ouvrage Réseaux sociaux et responsabilité chrétienne, souligne que les réseaux sociaux peuvent être un cadre de rencontre et d’amitié entre les jeunes. Mais il fait savoir également qu’on y fait la « promotion de la pornographie » et on y « banalise le sexe ». Pour lui, la « sexualité doit être enseignée ». Pas que cela, elle doit également respecter le code social qui est le mariage. « En dehors du mariage, l’église catholique propose l’abstinence, la continence aux jeunes et cela est possible. Un instinct peut toujours être apprivoisé. Mais s’il faut donner libre court aux instincts c’est donner libre cours aux dégâts », a fait savoir Abbé Justin Zangré.
Les différents acteurs interrogés reconnaissent que la situation est inquiétante. L’écrivaine Priscille Bansé se dit être inquiète car si cela continue ainsi « la société va être malade. Ce serait une calamité » avec le risque que le taux de prévalence aux VIH/ SIDA augmente.
Pour résoudre ce problème, les pistes de solutions ne manquent pas. Le psychologue Romuald Kaboré invite les parents à développer une mutuelle confiance entre les adolescents et eux-mêmes en instaurant une communication franche. Fatmata Bancé estime que la solution n’est plus la restriction de la télévision ou de l’Internet : « Il faut être franc avec nos enfants. Les transformer en copines et copains pour les amener à s’ouvrir à nous et leur montrer le bon côté de l’Internet et le danger qu’ils encourent ». Priscille Bansé raconte que, de nos jours, les jeunes filles ont plus peur de la grossesse que des maladies sexuellement transmissibles : « Il y a des jeunes filles qui prennent les pilules du lendemain. On a peur de la grossesse mais pas de la maladie », relate-t-elle tristement avant de proposer l’instauration d’une éducation complète à la sexualité dans les écoles et ce, dans toute l’Afrique de l’Ouest. « Il est temps de briser le tabou », recommande-t-elle.
Masbé NDENGAR de Bodo